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Préface

POUR LE POÈME « LE CAP ÉTERNITÉ »



Quand nous interrogions Charles Gill sur ce poème qu’il regardait comme l’œuvre capitale de sa vie, il répondait : « Il avance. » Et, jugeant la preuve indispensable, il nous lisait — rarement en vérité ― un fragment nouveau, de sa voix chaude, à la sonorité de bronze, et qui s’amollissait d’émotion aux beaux endroits. Si, la lecture finie, nous hasardions : « Est-ce tout ? » les promesses de travail sérieux recommençaient, sincères et jamais tenues. Gill s’imposait bien, par-ci par-là, de courtes périodes d’intense labeur, nocturne autant que diurne, puis il s’accordait de longs repos.

Le poème dont il avait tracé le plan il y a une dizaine d’années, ainsi que l’indique une note de ses cahiers : « Commencé pour de bon, ce mercredi des cendres, 24 février 1909 », est intitulé Le Saint-Laurent ; il est divisé en plusieurs livres et devait comprendre trente-deux chants : il en compte douze, la plupart inachevés, et quelques bribes des autres. Nous savons par l’auteur lui-même [1] qu’il ne considérait pas la présente version, qui est une partie du livre Le Cap Éternité, comme définitive, tel chant n’est pas même rimé. « Si je me fais un jour imprimer, disait-il, ce

  1. Il faut noter ici que, depuis 1913, deux attaques de paralysie faciale avaient contraint le poète à ménager ses forces. Ses cours réguliers de dessin et de peinture, qu’il continua quand même, l’occupaient sensiblement.