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TABLEAU ANCIEN

d’après un primitif italien


À Valère Gille..


L’Efféminé divin, pensif, pâle et plus pur
Qu’un lys d’eau balancé sur un étang d’azur,
Tel qu’un fils d’empereur légendaire, traverse
Les cités, qu’éblouit sa beauté vierge, et verse
Sur les femmes, sur les vieillards, sur les enfants,
Baignant leurs yeux soumis dans ses yeux triomphants,
Un fleuve de pardons, d’espoirs et de tendresses ;
Et ses mains qu’amollit la langueur des caresses
Angéliques, ses mains maternelles, qui font
Expirer tout orgueil et fléchir chaque front,
D’un geste auguste, plein de baisers et de lèvres,
Chassent de tous les cœurs les démons et les fièvres,
Tandis qu"à ses doigts fins, ignorés du travail,
À ses bras lumineux, cerclés d’or et d’émail,
Et sur son lilial vêtement de soieries
Rêvent les larges yeux sacrés des pierreries.
Ah ! si frêle et si femme, il est beau jusqu’aux pleurs !
Et son souffle, exhalant l’âme exquise des fleurs,