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Il faisait de la terre un jardin de douceur
Et réparait le mal fait par le créateur.

Quand il se proclama Fils de l’Être suprême
Quel était son dessein ? Se disant Dieu lui-même
Afin de laver Dieu de tous les maux humains,
Voulait-il, sur la croix où le clouaient nos mains,
Montrer que le bourreau, pour expier ses crimes,
Devenait la victime enfin de ses victimes ?…
Que ta cendre tressaille, ô Christ, dans le tombeau !
L’univers n’est, hélas ! ni meilleur ni plus beau.

Dieu, tu l’es devenu, comme le Bouddha, comme
François d’Assise, mais comme eux tu n’es qu’un homme,
Le plus grand, le plus saint, le plus pur, le plus doux
Des hommes, et l’on doit t’adorer à genoux.
Ô Christ, on t’a fait Dieu pour mieux t’être infidèle.
Homme, tout homme eût dû te prendre pour modèle,
Mais hypocritement ils ont dit : « Il est Dieu !
« Et qui de nous pourrait être semblable à Dieu ? »
— Dieu, tu l’es devenu dans l’idéal du monde,
Par ta pitié sans borne et par ta mort féconde
Qui nous donna l’amour, l’espérance et la foi,
Et seuls ceux-là sont Dieux qui sont pareils à toi.
Ô Fils de l’Homme, ô Christ, je t’aime et je t’adore
De tous les feux du vaste amour qui me dévore,
De toute la pitié qui déchire mon cœur,
Dès que j’entends gémir l’éternelle douleur,