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Pour cadencer un vers, qui dans Famé s’imprime,
Sans appauvrir Fidéè, enriehissoit la rime ;
S’ouvroit par notre oreille un chemin vers nos coeurs s
Et nous divertissoit, pour nous rendre meilleurs.
Maudit soit à jamais le pointilleux Sophiste
Qui le premier nous dit en prose d’Algébriste :
Vains Rimeurs, écoutez mes ordres absolus ;
Pour plaire à ma raison, pensez ; ne peignez plus.
Dès-lors ia Poésie a vu fa décadence ;
Infidelle à la rime, au sens, à la cadence,
Le compas à la main, elle va dissertant ;
Apollon fans pinceaux n’est plus qu’un lourd pédant.
C’étoit peu que, changée en bisarre Furie,
Melpomène étalât sur la Scène flétrie,
Des Romans forttouchans ; car à peine i’Auteur 3
Pour emporter les morts, laisse vivre un Acteur ;
Que soigneux d’évoquer des Revenans affables,
Prodigue de cotabats-, de marches admirables.
Tout Poète moderne, avec pompe assommant 3
Fît d’une Tragédie un Opéra charmant ;
La Muse de Sophocle, en robe doctorale,
Sur des tréteaux sanglans professe la morale :
Là, souvent un Sauvage, orateur apprêté,
Auíìi bien qu’Arouet, parle d’humanité :
Là, des Turcs amoureux soupirant des maximes s
Débitent galamment Séneque mis en rimes :