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découvrir beaucoup plus que ce que les contemporains de La Bruyère y voyaient. Aucun superlatif ne lui convient. Avec lui tout est modéré ; jusqu’à l’amour qu’il nous inspire. La modération de La Bruyère a ceci de très rare qu’aucune médiocrité du cœur ni de l’esprit ne la motive, mais bien une certaine honnêteté foncière, et l’horreur d’en faire accroire, qui n’a d’égale chez lui que celle de s’en laisser accroire.

La Bruyère peint les hommes tels qu’ils sont ; mais, comment ils deviennent ce qu’ils sont, c’est ce qu’il omet de nous dire et qui ne l’intéresse pas. Nul acheminement vers soi-