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de coutume ; mais elle s’est refusée. C’est comme ça que ça a commencé.

— Vous vous êtes alors disputé avec elle ?

— À cause de cela, oui.

— Voici le motif que vous donnez du crime. Vous aviez d’abord donné une autre explication.

L’accusé ne proteste pas ; son geste semble dire : c’est possible.

— La nuit ensuite a été tranquille ?

— Oui, Monsieur.

— Vous avez dit aussi que vous étiez jaloux ; c’est même là l’explication que vous aviez donnée d’abord. Est-ce que vous lui connaissiez un amant ?

— Elle n’en avait pas.

— Cependant elle était triste ; au magasin des Abeilles où elle travaillait, on a dit qu’elle était anxieuse ; elle avait peur de vous. Un jour elle a confisqué votre rasoir. Craignait-elle de vous voir vous en servir contre elle ?

— À ce moment j’étais malade. On lui avait dit de me l’enlever pour que je ne m’en serve pas contre moi.

— Arrivons au treize mars.

— Nous nous sommes dit bonjour au matin ; je suis descendu chercher le journal.

— Vous n’avez pas bu ?

— La veille, avant le souper, j’avais pris deux tasses de café à B. ; mais ce matin j’étais à jeun. En remontant près d’elle, je lui ai de nouveau demandé… Elle a encore refusé. Alors, comme elle ne voulait toujours pas, j’ai