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je prisse cette menace au sérieux. Mais le souci que je voyais qu’avait ma mère, mais ses objurgations, mais le chagrin silencieux de mon père, pénétrèrent enfin ma torpeur, qu’avait assez fort secouée déjà l’annonce de mon renvoi de l’Ecole. Ma mère exigea de moi des promesses ; Anna et elle s’ingénièrent à me distraire. La grande exposition universelle était sur le point de s’ouvrir ; nous allions, auprès des palissades, admirer les préparatifs…

Trois mois plus tard, je reparus sur les bancs de l’Ecole : j’étais guéri ; du moins à peu près autant qu’on peut l’être. Mais, peu de temps après, j’attrapai la rougeole, qui me laissa passablement affaibli ; mes parents, prenant alors le parti de me faire redoubler, l’an suivant, une classe où j’avais si peu profité, m’emmenèrent à La Roque sans attendre le commencement des vacances.


Lorsque en 1900 je fus amené à vendre La Roque, je renfonçai tous mes regrets, par crânerie, confiance en l’avenir, que j’étayais d’une inutile haine du passé, où se mêlait passablement de théorie ; on dirait au-