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plusieurs mots qui, indifféremment, peuvent désigner un même objet, et qu’on les nomme alors des synonymes. C’est ainsi, donnait-il en exemple, que le mot « coudrier » et le mot « noisetier » désignent à la fois le même arbuste. Et faisant alterner suivant l’usage, et pour animer la leçon, l’interrogation et l’enseignement, Monsieur Vedel pria l’élève Gide de répéter ce qu’il venait de dire…

Je ne répondis pas. Je ne savais pas répondre. Mais Monsieur Vedel était bon : il répéta sa définition avec la patience des vrais maîtres, proposa de nouveau le même exemple ; mais quand il me demanda de nouveau de redire après lui le mot synonyme de « coudrier », de nouveau je demeurai coi. Alors il se fâcha quelque peu, pour la forme, et me pria d’aller dans la cour répéter vingt fois de suite que « coudrier » est synonyme de « noisetier », puis de revenir le lui dire.

Ma stupidité avait mis en joie toute la classe. Si j’avais voulu me tailler un succès, il m’eût été facile, au retour de ma pénitence, lorsque Monsieur Vedel, m’ayant rappelé, me demanda pour la troisième fois