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après le chant des cantiques, la salutiste offrait le thé. On imagine, au milieu de l’assemblée, l’entrée de ma grand’mère dans son accoutrement nocturne !.. C’est peu de temps après, qu’elle quitta définitivement Uzès.


Avant de quitter Uzès avec elle, je veux parler de la porte de la resserre, au fond de la salle à manger. Il y avait, dans cette porte très épaisse, ce qu’on appelle un nœud de bois, ou plus exactement, je crois, l’amorce d’une petite branche qui s’était trouvée prise dans l’aubier. Le bout de branche était parti et cela faisait, dans l’épaisseur de la porte, un trou rond de la largeur du petit doigt, qui s’enfonçait obliquement de haut en bas. Au fond du trou, on distinguait quelque chose de rond, de gris, de lisse, qui m’intriguait fort :

— Vous voulez savoir ce que c’est ? me dit Rose, tandis qu’elle mettait le couvert, car J’étais tout occupé à entrer mon petit doigt dans le trou, pour prendre contact avec l’objet. — C’est une bille, que votre papa a glissée là quand il avait votre âge, et que, depuis, on n’a jamais pu retirer.