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vers ; ma mère trouvait que « ce n’était pas le moment » et s’écriait : — Paul, vous réciterez cela quand nous serons rentrés.

Dans l’appartement de ma grand’mère, toutes les pièces se commandaient ; de sorte que, pour gagner leur chambre, mes parents devaient traverser la salle à manger, le salon, et un autre salon plus petit où l’on avait dressé mon lit. Achevait-on le tour, on trouvait un petit cabinet de toilette, puis la chambre de grand’mère, qu’on gagnait également de l’autre côté, en passant par la chambre de mon oncle. Celle-ci rejoignait le palier, sur lequel ouvraient également la cuisine et la salle à manger. Les fenêtres des deux salons et de la chambre de mes parents regardaient l’esplanade ; les autres ouvraient sur une étroite cour que l’appartement ceinturait ; seule la chambre de mon oncle donnait, de l’autre côté de la maison, sur une obscure ruelle, tout au bout de laquelle on voyait un coin de la place du marché. Sur le rebord de sa fenêtre, mon oncle s’occupait à d’étranges cultures : dans de mystérieux