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d’Anna et ceux de sa chambre, qui donnaient tous deux sur la rue. Sur une cour donnaient la salle à manger et une salle de travail où Anna se tenait le plus souvent ; même elle y recevait plus volontiers que dans son salon les quelques intimes qui venaient la voir ; aussi ne me souviendrais-je sans doute pas du salon si ce n’eût été là qu’on avait dressé pour moi un petit lit pliant, lorsque à ma grande joie ma mère me confia pour quelques jours à son amie, je ne sais plus à quelle occasion.

L’année que j’entrai à l’École Alsacienne, mes parents ayant jugé sans doute que l’instruction que je recevais chez Mademoiselle Fleur et Madame Lackerbauer ne me suffisait plus, il fut convenu que je déjeunerais chez Anna une fois par semaine. C’était, il m’en souvient, le jeudi, après la gymnastique. L’École Alsacienne, qui n’avait pas encore, en ce temps-là, l’importance qu’elle a pris par la suite et ne disposait pas d’une salle spéciale pour les exercices physiques, menait ses élèves au « gymnase Pascaud », rue de Vaugirard, à quelques pas de chez Anna. J’arrivais chez elle encore en nage et en désordre, les vêtements pleins de