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lesquelles iraient sécher les plantes ; pour certaines, grêles ou fibreuses, quelques feuilles suffisaient ; mais il en était d’autres, charnues, gonflées de sève, qu’il fallait presser entre d’épais matelas de papier spongieux, bien secs et renouvelés chaque jour. Tout cela prenait un temps considérable, et nécessitait beaucoup plus de place qu’Anna n’en pouvait disposer à Paris.

Elle habitait, rue de Vaugirard, entre la rue Madame et la rue d’Assas, un petit appartement de quatre pièces exiguës et si basses que presque on en pouvait toucher de la main le plafond. Au demeurant l’appartement n’était pas mal situé, en face du jardin ou de la cour de je ne sais quel établissement scientifique, où nous pûmes contempler les essais des premières chaudières solaires. Ces étranges appareils ressemblaient à d’énormes fleurs, dont la corole eût été formée de miroirs ; le pistil, au point de convergence des rayons présentait l’eau qu’il s’agissait d’amener à ébullition. Et sans doute y parvenait-on, car un beau jour un de ces appareils éclata, terrifiant tout le voisinage et brisant les carreaux du salon