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tait, avec cet air supérieur et renseigné qu’il savait prendre, qu’il avait trouvé dans la bibliothèque abandonnée de son frère un livre des plus suggestifs : « Les souvenirs d’un chien de chasse », je crus d’abord qu’il s’agissait de vénerie.

Cependant la nouveauté de l’Encyclopédie s’épuisait et le temps vint que Lionel n’y trouva plus guère à apprendre. Par le plus singulier retour, nous fîmes alors, mais cette fois de conserve, des lectures du genre le plus sérieux : ce fut Bossuet, ce fut Fénelon, ce fut Pascal. À force de dire « l’année suivante » j’en arrive à ma seizième année. Je préparais mon instruction religieuse et la correspondance que j’avais commencé d’entretenir avec ma cousine m’inclinait également l’esprit. Cette année, passé l’été, Lionel et moi nous ne cessâmes pas de nous voir ; à Paris nous allions alternativement l’un chez l’autre. Rien de plus prétentieux que nos entretiens de cette époque, pour profitables qu’ils fussent ; nous avions la présomption d’étudier les grands écrivains susnommés ; nous commentions à qui mieux mieux des passages philosophiques, et que nous choisissions de