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V

Ce devait être aux approches du nouvel an. Nous étions à Rouen de nouveau ; non seulement parce que c’était temps de vacances, mais parce qu’après un mois d’essai, j’avais de nouveau quitté l’Ecole Alsacienne. Ma mère se résignait à me traiter en malade et acceptait que je n’apprisse rien que par raccroc. C’est-à-dire que de nouveau et pour longtemps mon instruction se trouvait interrompue.

Je mangeais peu ; je dormais mal. Ma tante Lucile était aux petits soins ; le matin Adèle ou Victor venait allumer le feu dans ma chambre ; du grand lit où je paressais longtemps après l’éveil, j’écoutais les bâches siffler, lancer contre le garde-feu d’inoffensives étincelles, et je sentais mon engourdissement se résorber dans le bien-être qui régnait du haut en bas de la maison. Séraphine me cuisinait pour les repas des petits plats spéciaux ; mais je restais devant