Page:Gide - Si le grain ne meurt, 1924.djvu/179

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faisions en classe, pour la classe elle-même, le régime des cours, les examens, les concours, les récréations même ; et l’immobilité sur les bancs, les lenteurs, les insipidités, les stagnances. Que mes maux de tête vinssent fort à propos, cela est sûr ; il m’est impossible de dire dans quelle mesure j’en jouai.

Brouardel, que nous avions d’abord comme docteur, était cependant devenu si célèbre que ma mère reculait à le demander, toute empêchée par je ne sais quelle vergogne, que certainement j’héritai d’elle et qui me paralyse également en face des gens arrivés. Avec Monsieur Lizart, qui l’avait remplacé près de nous, rien de pareil n’était à craindre ; on pouvait être bien assuré que la célébrité jamais ne se saisirait de lui, car il n’offrait aucune prise : un être débonnaire, blond et niais, à la voix caressante, au regard tendre, au geste mou ; inoffensif en apparence ; mais rien n’est plus redoutable qu’un sot. Comment lui pardonner ses ordonnances et le traitement qu’il m’indiqua ? Dès que je me sentais, ou prétendais, nerveux : du bromure ; dès que je ne dormais pas : du chloral. Pour un