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et, courant d’un arbuste à l’autre puis retombant en chevelure dans le vide hésitant au-dessus des eaux, le smilax aimé des bacchantes. La limpidité de la rivière éteignait aussitôt l’ardeur ferrugineuse des sources ; des troupeaux de goujons jouaient parmi les débris ardoisés faits du délitement des roches ; celles-ci ne s’abaissaient qu’un peu plus loin, en aval, où plus lentement coulaient des eaux plus profondes ; en amont, l’étrécissement de la rivière en précipitait le cours ; il y avait des remous, des bondissements, des cascades, des vasques fraîches où l’imagination se baignait ; par endroits lorsqu’un avancement de la falaise barrait la route, de grandes dalles espacées permettaient de passer sur l’autre rive ; par endroits les falaises des deux rives à la fois se rapprochaient : force était de gravir, quittant le bord des eaux, quittant l’ombre. On retrouvait, au-dessus des falaises, un terrain où quelques cultures fanaient sous un ardent soleil ; plus loin, aux premières pentes des monts, commençaient d’immenses forêts de châtaigniers séculaires.

La piscine de Lamalou-le-haut prétendait