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tard mes relations avec son fils Georges, professeur au Museum.

Ce don de vingt-quatre boîtes à fond de liège, pleines de coléoptères, classés, rangés, étiquetés, certes je fus flatté d’en avoir été jugé digne ; mais je n’ai pas souvenir qu’il m’ait fait un bien énorme plaisir. Ma pauvre collection particulière, auprès de ce trésor, paraissait trop humiliée ; et combien m’y étaient plus précieux chacun de ces insectes que j’y avais épinglés moi-même, après les avoir moi-même capturés. Ce que j’aimais, ce n’était pas la collection, c’était la chasse.

Je rêvais aux heureux coins de France hantés de capricornes et cerfs-volants, qui sont les plus gros coléoptères de nos climats ; à La Roque on n’en trouvait point ; mais, au pied d’un antique tas de sciure, à côté de la scierie de Blancmesnil, J’avais surpris une colonie de rhynocéros, c’est-à-dire d’oryctes nasicornes. Ces beaux insectes d’acajou vernissé, presque aussi gros que les lucanes, portent, entre les deux yeux, la corne retroussée à laquelle ils doivent leur nom. Je fus comme fou la première fois que je les vis.

En creusant la sciure, on découvrait aussi