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sible que tant qu’on ne les a pas tentées.


Nous avions passé une partie du mois de septembre aux environs de Nîmes, dans la propriété du beau-père de mon oncle Charles Gide qui venait de se marier. Mon père avait rapporté de là une indisposition qu’on affectait d’attribuer aux figues. De vrai, le désordre était dû à de la tuberculose intestinale ; et ma mère, je crois, le savait ; mais la tuberculose est une maladie qu’en ce temps on espérait guérir en ne la reconnaissant pas. Au reste mon père était sans doute déjà trop atteint pour qu’on pût espérer triompher du mal. Il s’éteignit assez doucement le 28 octobre de cette année (1880).

Je n’aï pas souvenir de l’avoir vu mort ; mais peu de jours avant sa fin, sur le lit qu’il ne quittait plus. Un gros livre était devant lui, sur les draps, tout ouvert, mais retourné, de sorte qu’il ne présentait que son dos de basane ; mon père avait dû le poser ainsi au moment où j’étais entré. Ma mère m’a dit plus tard que c’était un Platon. J’étais chez Vedel. On vint me chercher ; je ne sais plus qui ; Anna peut-être. En