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visiter la Sainte-Chapelle, Notre-Damne, le Panthéon, le Musée des Arts et Métiers — où, dans une petite salle obscure, se trouvait un petit miroir sur lequel, par un ingénieux jeu de glaces, venait se refléter, en petit, tout ce qui se passait dans la rue ; cela faisait un tableautin des plus plaisants avec des personnages animés, à l’échelle de ceux de Téniers, qui s’agitaient ; tout le reste du musée distillait un ennui morne ; — les Invalides, le Louvre, et un extraordinaire endroit, situé tout contre le parc de Montsouris, qui s’appelait le Géorama Universel : c’était un misérable jardin, que le propriétaire, un grand lascar vêtu d’alpaga, avait aménagé en carte de géographie. Les montagnes y étaient figurées par des rocailles ; les lacs, bien que cimentés, étaient à sec ; dans le bassin de la Méditerranée naviguaient quelques poissons rouges comme pour accuser l’exiguité de la botte italienne. Le professeur nous invitait à lui désigner les Karpathes, cependant que le lascar, une longue baguette à la main, soulignait les frontières, nommait des villes, dénonçait un tas d’ingéniosités indistinctes et saugrenues, exaltait son œuvre, insistant