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plus facile il n’aura qu’à vendre son titre de rente à la Bourse.

3° L’État emprunte d’ordinaire au-dessous du pair, c’est-à-dire qu’il se reconnaît débiteur d’une somme supérieure à celle qu’il a réellement touchée. Par exemple voici un État qui trouverait facilement prêteur au taux de 5 p. 0/0 : il pourrait en conséquence émettre des titres représentant un capital de 100 francs et rapportant un intérêt de 5 francs et les mettre en vente au prix de 100 francs, c’est-à-dire au pair. Ce serait assurément le procédé le plus simple : quelques pays font ainsi, mais d’ordinaire l’État français s’y est pris d’une autre façon. Il a émis des titres représentant un capital de 100 francs et rapportant un intérêt de 3 francs seulement mais comme il n’aurait pu autrefois mettre en vente un pareil titre au prix de 100 francs, c’est-à-dire au pair, car il n’aurait pas trouvé un seul prêteur dans ces conditions — alors, il l’offrait au prix de 60 francs, par exemple. Il est clair que pour les prêteurs l’opération revenait au même que la précédente, puisque toucher 3 francs de rente pour une somme de 60 francs versée, c’était en réalité placer son argent à 5 p. 0/0 c’était même beaucoup plus, avantageux pour le prêteur ; en effet, quoiqu’il n’eût donné que 60 francs, il recevait en échange un titre dont la valeur nominale était de 100 francs et dont la valeur réelle pourrait atteindre un jour ce chiffre si le crédit de l’État faisait des progrès — et c’est précisément ce qui s’est réalisé[1].

Mais c’est de la part de l’État qu’on ne s’explique guère une semblable opération, car non seulement elle est étrangement compliquée, mais encore elle parait absolument ruineuse et ressemble trop à ces emprunts que les fils de famille font à des usuriers, par lesquels ils se reconnaissent débiteurs de 1.000 francs alors qu’ils n’ont touché en réalité que la moitié ou les trois quarts de la somme ! En réalité sur les 31 milliards qui constituent la dette de l’État à ce jour, il n’a certainement pas reçu 25 milliards, probablement moins.

  1. Le 3 p. 0/0 français a dépassé 100 francs depuis ; le 3 p. 0/0 anglais l’a déjà dépassé depuis longtemps quoiqu’il ait été réduit à 2 3/4 et quoiqu’en 1903 il doive l’être encore à 2 1/2.