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§ 2. Bénéfices provenant d’industries et monopoles.

Pour que l’État pût se suffire à lui-même, il ne serait pas indispensable qu’il possédât, des domaines et vécût en propriétaire rentier ; on peut admettre aussi qu’il fonde une industrie ou un commerce lucratif et gagne ainsi sa vie comme un entrepreneur privé.

Cette branche de revenus, à la différence de la précédente qui tend à diminuer, tend à grandir de jour en jour en raison même du développement du socialisme d’État. En France, par exemple, l’État exerce les industries les plus variées il a le monopole de la monnaie, du tabac, de la poudre, des allumettes, des cartes à jouer il a seul le droit d’expédier toutes les correspondances postales, télégraphiques et téléphoniques en outre il fabrique, mais sans monopole, des porcelaines (Sèvres), des tapis (les Gobelins) : il est imprimeur (Imprimerie Nationale), journaliste (Journal Officiel) ; il exploite un réseau de chemin de fer (chemin de fer de l’État). Le tout réuni donne un produit brut de plus de 750 millions, mais comme il y inévitablement des frais très considérables, le produit net est de beaucoup inférieur et ne dépasse guère 350 millions. Plusieurs États, l’Allemagne notamment, possèdent leurs chemins de fer et en tirent un revenu considérable[1]. Beaucoup de municipalités (notamment aux États-Unis, en Belgique) exploitent directement des entreprises d’éclairage, d’eaux, de forces motrices, de tramways[2].

  1. En Suisse l’État (la Fédération) va probablement racheter tous ses chemins de fer. En France, l’État est l’héritier désigné de toutes les grandes Compagnies de chemin de fer de France, héritage qui vaut à ce jour une douzaine de milliards de francs au moins, et qui doit lui échoir vers le milieu du prochain siècle (puisque c’est à cette époque qu’expirent les concessions) — s’il ne l’a pas mangé par anticipation d’ici là.
  2. On a proposé récemment a l’État de prendre en main une exploitation commerciale qui ne lui rapporterait pas moins d’un milliard par an ! à savoir la vente de l’eau de vie. Ce projet, dont l’auteur est M. Alglave, professeur de science financière à la Faculté de Paris, a été écarté en France ; mais la Suisse et la Russie sont entrées dans cette voie.
    Que l’État se fasse débitant d’eau de vie, c’est très discutable, mais pour certaines branches d’industries qui, par leur nature, ne peuvent