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que nous tâchons de faire durer les choses le plus possible et si l’on pouvait faire toutes choses inusables, elles répondraient non pas moins bien mais bien mieux à leur destination, car en telle hypothèse, elles pourraient être utilisées à perpétuité et ce serait l’idéal de la consommation économique (prenez garde qu’inusable ne veut pas dire inutilisable !)

En sens contraire, il ne faut pas confondre consommation avec production. Il est vrai que la production des richesses exige une consommation incessante de matières premières, de houille, etc., et les économistes désignent généralement cette consommation sous le nom de « consommation reproductive », pour la distinguer de l’autre, de celle qui sert à la satisfaction immédiate de nos besoins et qu’ils appellent « consommation improductive », Mais cette dernière seule est la vraie et c’est à celle-ci seulement qu’il faudrait réserver ce nom. Le geste du semeur qui sème son blé doit rester le symbole de l’acte de production par excellence le qualifier d’acte de consommation, assimilant par à deux faits aussi opposés que de semer le blé et de le manger, ne peut se justifier que par la pauvreté et l’incorrection de la terminologie économique.

Sans doute, le procès économique forme un circuit fermé l’homme produit pour manger et il faut bien aussi qu’il mange pour produire. Et cela est si vrai que de même que certains économistes voient dans les, semailles un acte de consommation, d’autres voient dans l’alimentation un acte de production parce qu’ils voient dans les aliments consommés par les travailleurs le type même du capital (Voy. p..156). Mais il faut pourtant, si l’on veut s’y reconnaître, marquer à un point quelconque la fin et le commencement. Or, la fin de tout le procès économique c’est l’homme c’est en arrivant à lui seulement que la richesse se consomme définitivement jusque-là et à travers toutes ses transformations, elle est simplement en cours de production[1].

  1. Par conséquent quand l’homme n’est lui-même qu’un simple instrument de production, esclave pour le maître ou salarié pour le patron, la consommation qu’il fait est à bon droit considérée par celui qui l’emploie comme frais de production.