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salariés qui ne sont nullement copropriétaires de la fabrique et même n’ont en général aucune part dans les bénéfices réservés exclusivement aux consommateurs[1]. Toutefois, cette participation des ouvriers non seulement aux bénéfices, mais à la propriété (co-partnership) est énergiquement réclamée par une partie des coopérateurs anglais et déjà réalisée par le magasin en gros des sociétés d’Écosse. — Dans le système individualiste (qu’il vaudrait mieux appeler autonomiste), l’initiative part des ouvriers eux-mêmes se constituant en associations autonomes, et le rôle des sociétés de consommation se borne à leur prêter des capitaux, à leur assurer des débouchés et à les empêcher de se faire concurrence[2].

Comme conclusion à ce chapitre et à tout le livre sur la répartition, disons que si, on pense que l’évolution politique procède par ces trois phases successives, monarchie absolue, monarchie constitutionnelle, république, — on a droit de penser que l’évolution économique dans ses formes successives, d’abord coercitive, esclavage, puis patronale, salariat, puis patronale tempérée par la participation aux bénéfices et une certaine part accordée aux ouvriers dans la propriété et direction de l’entreprise, enfin coopérative avec l’association de production — devra correspondre, étape par étape, à l’évolution politique. Mais on a droit aussi de penser que l’avènement de la démocratie dans la sphère économique sera plus lente, plus difficile et ménagera encore plus de déceptions que dans la sphère politique.

  1. Il va sans dire que ces ouvriers participent aux bénéfices en tant que consommateurs s’ils sont eux-mêmes membres de la société de consommation qui les emploie.
  2. En Angleterre, les associations autonomes de production étaient en 1897 au nombre de 201 avec un personnel de 8.900 ouvriers associés et une production de 73 millions de francs. — Les entreprises de production fondées directement par les sociétés de consommation soit isolées soit groupées en Wholesales (magasins de gros) employaient 18.000 ouvriers et produisaient pour 120 millions de francs d’articles divers (Voir plus loin pour les sociétés coopératives de consommation).