Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/563

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tout, plus de 200 sociétés ouvrières de production mais il n’en est qu’une seule (fabricants de limes) qui ait survécu. Il y eut un nouvel élan en 1866-67 et d’autres se fondèrent qui ne furent pas beaucoup plus heureuses. Cependant on en compte aujourd’hui 164 dont quelques-unes très prospères.

Les obstacles que rencontrent les associations coopératives de production sont très nombreux et n’expliquent que trop leurs insuccès :

1o Le premier et le plus considérable est le défaut d’éducation économique de la classe ouvrière qui ne lui permet encore : — ni de trouver toujours dans ses rangs des hommes capables de diriger une entreprise industrielle ; — ni, en supposant qu’elle les trouve, de savoir les élire et les garder comme gérants, leur supériorité même devenant trop souvent une cause d’exclusion ; ni en supposant qu’elle accepte leur direction, de savoir leur assurer une part dans les produits proportionnelle aux services qu’ils rendent, la supériorité du travail intellectuel sur le travail manuel n’étant pas encore suffisamment comprise.

2o Le second, c’est le défaut de capital. Nous savons que si l’on peut éliminer le capitaliste de l’entreprise productive, on ne peut pas en tout cas éliminer le capital, et la grande production exige aujourd’hui des capitaux de plus en plus considérables (Voy. p. 186). Comment de simples ouvriers pourront-ils se les procurer ? Sou à sou par leur épargne de chaque jour ? Cela peut se faire et s’est fait en effet dans quelques entreprises de petite industrie, mais seulement au prix de sacrifices héroïques, et on ne peut y compter d’une façon générale. — En se les faisant prêter par l’État ? L’expérience a été faite en 1848, mais les 3 millions distribués de la sorte n’ont pas porté bonheur aux sociétés qui les avaient reçus. L’argent donné, surtout quand il est donné par l’État, se gaspille le mieux du monde.

Cependant nous ne considérons pas cette difficulté comme insurmontable. Des associations ouvrières solidement organisées, une fois qu’elles auraient fait leurs preuves, trouveraient facilement à emprunter tous les capitaux qui leur se-