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sonnel de son possesseur. Et la question à résoudre préalablement c’est si le capital ainsi défini peut faire l’objet d’un droit de propriété légitime : — or en ces termes, ce droit n’est pas niable, même pour Karl Marx. Cela donc admis, restera à voir si ce capital pourra légitimement être employé à faire travailler d’autres personnes que son possesseur, et si son propriétaire pourra légitimement en retirer un profit ou un intérêt c’est une toute autre question[1] que nous devons ajourner au moment où nous traiterons du profit.


II

DE LA LÉGITIMITÉ DE L’INTÉRÊT.

Entre toutes les catégories de revenus, il n’en est aucun dont la légitimité ait été plus vivement contestée que celui qui provient d’un capital prêté et qu’on appelle l’intérêt. Depuis plus de deux mille ans cette question a soulevé une polémique véhémente et ininterrompue.

Voici les points principaux de la discussion :

1° On disait, comme Aristote, que l’argent est improductif : une pièce de monnaie ne fait pas de petits.

Et les économistes de répondre que l’argent ne fait que représenter le capital qui, lui, est productif et par définition et par nature. Avec de l’argent, dit Bentham, on achète des moutons qui, eux, font des petits.

2° On disait qu’en prêtant son argent, le prêteur ne s’impose aucune privation réelle et qu’en conséquence il n’a droit à aucune indemnité sous forme d’intérêt ?

  1. Ce n’est pas ici une question de mots. Et la preuve c’est qu’avec tous les coopératistes nous admettons la légitimité de la propriété privée du capital et pourtant nous considérons le salariat et le profit comme des formes non point légitimes, mais inférieures et destinées à être graduellement éliminées par l’évolution économique. — Et nous attendons une organisation économique dans laquelle il n’y aura plus ni salariés ni patrons mais dans laquelle il y aura tout de même des capitalistes.