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I

LE PARTAGE ÉGAL.


Ce mode de répartition enfantin paraît avoir existé dans un passé très lointain, puisque tous les antiques législateurs dont l’histoire ou la légende nous ont transmis les noms, Minos, Lycurgue, Romulus, paraissent avoir procédé à un partage égal de la terre, sinon par tête du moins par famille. Et comme au bout de quelques générations l’égalité primitive se trouvait nécessairement rompue, on la rétablissait par de nouveaux partages. Un tel système était possible dans des sociétés primitives qui ne comptaient qu’un petit nombre de citoyens et une seule catégorie de richesses, la terre. Mais dans des sociétés comme les nôtres, il serait insensé et il n’y a plus aujourd’hui, même parmi les socialistes révolutionnaires, de partageux.

Cependant il reste quelque chose de cette idée simpliste au fond de tous tes systèmes socialistes. Ils se fondent tous en effet plus ou moins sur cette idée que puisque les richesses sont si inégalement réparties et que les uns ont trop et les autres trop peu, le remède est bien simple : il saura de prendre aux riches ce qu’ils ont en trop pour le donner aux pauvres. Et du même coup on aura supprimé l’oisiveté, car les riches, une fois privés de leurs rentes, seront bien forcés de travailler. — En tout cas, tel est certainement le sentiment populaire.

Mais tandis que le public est fortement impressionné par le fait de la concentration des richesses entre les mains de quelques-uns, il est un autre fait non moins important qui échappe complètement à son attention, c’est le petit nombre des riches même dans les pays les plus riches.

En Prusse, où l’impôt sur le revenu oblige à dresser les statistiques des fortunes et où ces statistiques sont faites avec