3° Enfin, en admettant même que la banque en puisse émettre une quantité exagérée, il lui serait impossible de les maintenir dans la circulation, car si le billet est émis en quantité surabondante, il sera nécessairement déprécié, et sitôt qu’il sera déprécié et si peu qu’il le soit, les porteurs du billet s’empresseront de le rapporter à la banque pour en demander le remboursement. Elle aura donc beau s’efforcer d’en inonder le public, elle ne pourra y réussir, car elle en sera inondée à son tour.
Cette argumentation renferme certainement une part de vérité et même l’expérience l’a généralement confirmée. Les banques ont rarement réussi à faire pénétrer dans la circulation plus de billets que n’en comportaient les besoins.
Néanmoins on ne saurait se dissimuler que la liberté absolue d’émission ne puisse avoir de graves dangers, sinon en temps normal, du moins en temps de crise ; or les crises sont un accident de plus en plus fréquent dans la vie économique de nos sociétés modernes.
Sans doute il est vrai, en théorie, que la quantité de billets qui sera émise dépend de la demande du public et non de la volonté des banques. Remarquez cependant que si une banque peu scrupuleuse a pour unique but d’attirer les clients, elle pourra toujours, en abaissant suffisamment le taux de l’escompte, accroître inconsidérément le chiffre de ses opérations et par conséquent aussi de ses émissions.
Il est vrai encore que les billets émis en quantité exagérée par cette banque imprudente reviendront au remboursement sitôt qu’ils seront dépréciés : mais remarquez que la dépréciation ne se fait pas sentir instantanément : ce ne sera qu’au bout de quelques jours, de quelques semaines peut-être ; et si pendant ce temps la Banque a émis une quantité de billets exagérée, le jour où ils lui reviendront, il sera trop tard ! elle ne sera plus en mesure de les rembourser et sera submergée sous ce reflux dont nous parlions tantôt. Il est vrai que la Banque sera la première punie de son imprudence par la faillite. Mais que nous importe ! Nous nous
