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eux et se servant du crédit que leur confère l’association pour se faire aussi prêter par des tiers dans des conditions plus avantageuses. Les plus célèbres de ces associations sont celles connues sous le nom de leur inventeur, Banques Raiffeisen[1].

Ces sociétés présentent les caractères suivants : 1° les associés n’apportent aucune mise dans la société : elle se constitue donc sans capital, il n’y a point d’actions ; 2° ils ne touchent aucun dividende : les profits, s’il y en a, restent dans le fonds indivisible ; 3° ils sont tous solidairement responsables sur tous leurs biens. C’est là surtout le trait caractéristique qui leur confère une valeur morale et éducative remarquable. Il y a aussi en Allemagne un autre type de sociétés de crédit agricole qu’on appelle Schulze-Delitzsch (Voy. le § suivant), qui ont toujours pratiqué aussi la solidarité illimitée, mais qui distribuent des dividendes et ont un caractère plus capitaliste.


§ 3. — Crédit populaire.

On connaît le proverbe « on ne prête qu’aux riches » et l’expérience de tous les jours le vérifie. Cependant les pau-

  1. C’est en 1849 que Raiffeisen a fondé la première caisse. À sa mort en 1888, il y en avait 862. En 1896 on en comptait 2.666. Ce sont de petites sociétés ayant un caractère philanthropique et même un peu socialiste chrétien. — De plus, il y a en Allemagne 5 ou 6.000 sociétés de crédit agricole appartenant à d’autres types.
    En Italie, il en existe un assez grand nombre qui utilisent fort ingénieusement les fonds déposés dans les caisses d’épargne.
    En France le crédit agricole sous forme de sociétés mutuelles (caisses rurales) était presque inconnu jusqu’à ces derniers temps peut-être parce que le paysan français se trouve dans une condition relativement aisée et parce qu’il n’est pas dévoré par l’usure autant que les populations agricoles d’un grand nombre de pays. Cependant, depuis quelques années, il s’en est fondé un assez grand nombre, 5 ou 600 environ, ayant un caractère catholique très accentué.
    Une loi récente du 3 novembre 1894 a permis aux syndicats agricoles (Voy. ci-dessus, p. 192) de fonder des sociétés de crédit agricole ; elles ne devront point distribuer de dividendes. — Un projet de loi (non encore voté), crée des caisses régionales de crédit agricole et les dote avec un capital de 40 millions fr., prêté sans intérêt, par la Banque de France comme prix du renouvellement de son privilège, et avec une annuité de 2 millions qu’elle a dû consentir également (Voy. p. 369, note).