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fut pluvieux cette année ; les bois pourris ne se colorèrent qu’à peine, et sur les bords de l’étang débordé tu ne pouvais venir t’asseoir.

*

Cette année, je fus sans cesse occupé sur les terres. J’assistais aux récoltes et aux labours. Je pus voir l’automne avancer. La saison était incomparablement tiède, mais pluvieuse. Vers la fin de septembre, une effrayante bourrasque qui n’arrêta pas de souffler durant douze heures, sécha les arbres d’un seul côté. Peu de temps après les feuilles qui étaient restées à l’abri du vent se dorèrent. Je vivais si loin des hommes que cela me parut aussi important à dire que n’importe quelle passion.

*

Il y a des jours et d’autres jours encore. Il y a des matins et des soirs.

— Il y a des matins où l’on se lève avant l’aube, — plein de torpeur. Ô ! gris matin d’automne, où l’âme s’éveille non reposée, si lasse et d’une si brûlante veillée, qu’elle souhaite dormir encore et suppute le goût de la mort. — Demain je quitte