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… Cet été, tous mes désirs eurent soif.

Il semblait qu’ils eussent traversé des déserts.

Et je me refusais à leur donner à boire,

Tant je les savais malades pour avoir bu. —

(Il y avait des grappes où dormait de l’oubli ; il y en avait où mangeaient des abeilles ; il y en avait où du soleil semblait rester.) —

… Un désir s’est assis à mon chevet tous les soirs.

Je l’y retrouve à chaque aurore.

Il a veillé sur moi toute la nuit.

J’ai marché ; j’ai voulu lasser mon désir :

Je n’ai pu fatiguer que mon corps.

Chante à présent, Cléodalise, la

RONDE
DE TOUS LES DÉSIRS

Je ne sais ce que j’avais pu rêver cette nuit.

À mon réveil tous mes désirs eurent soif.

Il semblait qu’en dormant, ils eussent traversé des déserts.

Entre le désir et l’ennui
Notre inquiétude balance. —

Désirs ! Est-ce que vous ne vous lasserez pas ?