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« Il me serra la main silencieusement et regagna son étude sans se retourner.

« En relisant les pages des Faux-Monnayeurs que je montrais à Georges, je les ai trouvées assez mauvaises. Je les transcris ici telles que Georges les a lues ; mais tout ce chapitre est à récrire. Mieux vaudrait parler à l’enfant, décidément. Je dois trouver par où le toucher. Certainement, au point où il en est, Eudolfe (je changerai ce nom ; Georges a raison) est difficilement ramenable à l’honnêteté. Mais je prétends l’y ramener ; et quoi qu’en pense Georges, c’est là le plus intéressant, puisque c’est le plus difficile. (Voici que je me mets à penser comme Douviers !) Laissons aux romanciers réalistes l’histoire des laisser-aller. »

Sitôt de retour dans la salle d’études, Georges avait fait part à ses deux amis des avertissements d’Édouard. Tout ce que celui-ci lui disait au sujet de ses chaparderies avait glissé sur cet enfant sans l’émouvoir ; mais quant aux fausses pièces, qui risquaient de leur jouer de mauvais tours, il importait de s’en débarrasser au plus vite. Chacun d’eux en gardait sur lui quelques-unes qu’il se proposait d’écouler à une prochaine sortie. Ghéridanisol les rassembla et courut les jeter dans les fosses. Le soir même il avertissait Strouvilhou, qui prit des mesures aussitôt.