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« Mon cher Georges,

« Oui, c’est moi qui t’écris, et pour te demander de me rendre un petit service. Je ne t’apprendrai sans doute rien en te disant que je suis de retour à Paris, car je crois bien que tu m’as aperçu ce matin près de la Sorbonne. J’étais descendu chez le comte de Passavant (il donna l’adresse) ; mes affaires sont encore chez lui. Pour des raisons qu’il serait trop long de te donner et qui ne t’intéresseraient guère, je préfère ne pas retourner chez lui. Il n’y a qu’à toi que je puisse demander de me rapporter les-dites affaires. Tu voudras bien, n’est-ce pas, me rendre ce service ; à charge de revanche. Il y a une malle fermée. Quant aux affaires qui sont dans la chambre, tu les mettras toi-même dans ma valise et m’apporteras le tout chez l’oncle Édouard. Je paierai l’auto. C’est demain dimanche, heureusement ; tu pourras faire ça dès que tu auras reçu ce mot. Je compte sur toi, hein ?

« Ton grand frère,
« Olivier.

« P.-S. — Je te sais débrouillard et ne doute pas que tu ne fasses tout cela très bien. Mais fais bien attention, si tu as affaire directement avec Passavant, de rester très froid avec lui. À demain matin. »

Ceux qui n’avaient pas entendu les propos injurieux de Dhurmer, ne s’expliquaient pas bien la brusque agression d’Olivier. Il paraissait avoir perdu la tête. S’il avait su garder son sang-froid, Bernard