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leur. Si j’ai levé votre valise, c’était surtout pour entrer en rapports.

Bernard avait débité tout cela presque d’une haleine. Une flamme extraordinaire animait son discours et ses traits ; on aurait dit de la bonté. Il paraissait au sourire d’Édouard que celui-ci le trouvait charmant.

— Et maintenant… ? fit-il.

Bernard comprit qu’il gagnait du terrain :

— Et maintenant, n’aviez-vous pas besoin d’un secrétaire ? Je ne puis croire que je remplirais mal ces fonctions, quand ce serait avec tant de joie.

Cette fois, Édouard se mit à rire. Laura les regardait tous deux, amusée.

— Ouais !… C’est à voir, et nous allons y réfléchir. Venez me retrouver, demain, à la même heure, ici même, si Madame Douviers le permet… car avec elle également j’aurai à décider de bien des choses. Vous êtes à un hôtel, je suppose ? Oh ! je ne tiens pas à savoir où. Peu m’importe. À demain.

Il lui tendit la main.

— Monsieur, dit Bernard, avant de vous quitter, me permettrez-vous peut-être de vous rappeler qu’il habite, au faubourg Saint-Honoré, un pauvre vieux professeur de piano, du nom, je crois bien, de La Pérouse, à qui, si vous l’alliez revoir, vous feriez un bien grand plaisir.

— Parbleu, pour un début, voici qui n’est pas mal, et vous entendez vos futures fonctions comme il faut.

— Alors… Vraiment, vous consentiriez ?