Page:Gide - Les Faux-monnayeurs.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de cette « boîte » son grand-père, dont le souvenir dicta le choix de sa mère plus tard.

« — D’ailleurs, ajouta-t-il, je manque de points de comparaison ; et sans doute tous ces chauffoirs se valent ; je crois même volontiers, d’après ce qu’on m’a dit, que la plupart des autres sont pires. N’empêche que je serai content d’en sortir. Je n’y serais pas entré du tout si je n’avais pas eu à rattraper le temps où j’ai été malade. Et depuis longtemps, je n’y retourne plus que par amitié pour Armand.

« J’appris alors que ce jeune frère de Laura était son condisciple. Je dis à Olivier que je ne le connaissais presque pas.

« — C’est pourtant le plus intelligent et le plus intéressant de la famille.

« — C’est-à-dire celui auquel tu t’es le plus intéressé.

« — Non, non ; je vous assure qu’il est très curieux. Si vous voulez, nous irons causer un peu avec lui dans sa chambre. J’espère qu’il osera parler devant vous.

« Nous étions arrivés devant la pension.

« Les Vedel-Azaïs avaient remplacé le traditionnel repas de noces par un simple thé moins dispendieux. Le parloir et le bureau du pasteur Vedel étaient ouverts à la foule des invités. Seuls quelques rares intimes avaient accès dans l’exigu salon particulier de la pastoresse ; mais, pour éviter l’envahissement, on avait condamné la porte entre le parloir et ce salon, ce qui faisait Armand répondre à ceux qui lui demandaient par où l’on pouvait rejoindre sa mère :

« — Par la cheminée.