— Du moins envers notre père et notre mère. Tu sais que j’avais fui de la maison.
— Oui, je sais. Il y a longtemps n’est-ce pas ?
— À peu près quand j’avais ton âge.
— Ah !… Et c’est là ce que tu appelles tes torts ?
— Oui, ce fut là mon tort, mon péché.
— Quand tu partis, sentais-tu que tu faisais mal ?
— Non ; je sentais en moi comme une obligation de partir.
— Que s’est-il donc passé depuis ? pour changer ta vérité d’alors en erreur.
— J’ai souffert.
— Et c’est cela qui te fait dire : j’avais tort ?
— Non, pas précisément : c’est cela qui m’a fait réfléchir.
— Auparavant tu n’avais donc pas réfléchi ?
— Si, mais ma débile raison s’en laissait imposer par mes désirs.
— Comme plus tard par la souffrance. De sorte qu’aujourd’hui, tu reviens… vaincu.
— Non, pas précisément ; résigné.
— Enfin, tu as renoncé à être celui que tu voulais être.
— Que mon orgueil me persuadait d’être.
L’enfant reste un instant silencieux, puis brusquement sanglote et crie :
— Mon frère ! je suis celui que tu étais en partant. Oh ! dis : n’as-tu donc rencontré rien que de décevant sur la route ? Tout ce que je pressens au dehors, de différent d’ici, n’est-ce donc que mirage ? tout ce que je sens