Page:Gide - Le Voyage d’Urien, Paludes.djvu/78

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moi nous partîmes furtivement à la recherche du navire.

— C’était encore le crépuscule, mais on n’entendait plus de bruits. Après avoir doublé les terrasses, nous nous trouvàmes derrière la ville ; de longues murailles s’étendaient, et devant elles un peu de sable où des égouts jetaient d’intolérables puanteurs. Nous nous hâtions à cause de la mer et de la nuit montantes, mais pensant pouvoir peut-être revenir par une autre route, si la marée couvrait celle-ci. — Après les murs, ce furent des falaises basses, d’argile ; l’espace qui les séparait de l’eau devenait toujours plus étroit, et les vagues enfin mouillèrent le pied des falaises. Nous nous sommes arrêtés, incertains, pour savoir ce que faisait la mer. Mais le flot ne montait pas encore ; marchant sur les roches émergées, nous avons repris notre route. Un promontoire s’avançait ; nous pensions après voir la plage. Nos pieds glissaient sur les herbes molles ; l’eau qu’on ne voyait presque pas, grise et pleine de crépuscule clapotait faiblement entre les roches ; une inquiétude nous prenait, tant cette eau semblait indécise.