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les grandes chasses dans la forêt, les délivrances glorieuses et le retour, le soir, par le même sentier, dans la poussière, et cette joie d’avoir accompli nos journées — et les fatigues, ah ! Madame, et l’air triste que nous avions ! Comme nos vies sont sérieuses ! Et nos courses sur la montagne, quand, à l’heure où le soleil tombait et que dans la vallée montait l’ombre, parfois nous nous sentions si près de saisir nos chimères, que notre cœur en avait des tressaillements d’allégresse !… La reine me regardait toujours et ses yeux souriaient un peu, me disant : Est-ce vrai ? Mais moi j’étais si convaincu, que je lui dis : Ô ! oui Madame. — Puis comme la lune passait je m’éeriai : Si je suis si triste pour elle, c’est à cause de sa pâleur. La reine alors : Qu’est-ce que cela vous fait ? me dit-elle : et cela me parut soudain tellement égal que je fus bien forcé d’en convenir.

Et les jours s’en allaient ainsi, en promenades ou en fêtes.


La reine, de la barque, un soir, avait laissé,