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— Dis-moi, Gertrude… t’a-t-il dit qu’il t’aimait ?

— Il ne me l’a pas dit ; mais je sens bien cela sans qu’on le dise. Il ne m’aime pas tant que vous.

— Et toi, Gertrude, tu souffres de le voir partir ?

— Je pense qu’il vaut mieux qu’il parte. Je ne pourrais pas lui répondre.

— Mais, dis : tu souffres, toi, de le voir partir ?

— Vous savez bien que c’est vous que j’aime, pasteur… Oh ! pourquoi retirez-vous votre main ? Je ne vous parlerais pas ainsi si vous n’étiez pas marié. Mais on n’épouse pas une aveugle. Alors pourquoi ne pourrions-nous pas nous aimer ? Dites, pasteur, est-ce que vous trouvez que c’est mal ?

— Le mal n’est jamais dans l’amour.

— Je ne sens rien que de bon dans mon cœur. Je ne voudrais pas faire souffrir Jacques. Je voudrais ne faire souffrir per-