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déjà, dans ce pays perdu, il me fallait tout décider. J’étais quelque peu gêné, je l’avoue, de laisser cette maison, si pauvre que fût son apparence, à la seule garde de cette voisine et de cette servante enfant. Toutefois il ne paraissait guère probable qu’il y eût dans un recoin de cette misérable demeure, quelque trésor caché… Et qu’y pouvais-je faire ? Je demandai néanmoins si la vieille ne laissait aucun héritier.

La voisine prit alors la chandelle, qu’elle dirigea vers un coin du foyer, et je pus distinguer, accroupi dans l’âtre, un être incertain, qui paraissait endormi ; l’épaisse masse de ses cheveux cachait presque complètement son visage.

— Cette fille aveugle ; une nièce, à ce que dit la servante ; c’est à quoi la famille se réduit, paraît-il. Il faudra la mettre à l’hospice ; sinon je ne sais pas ce qu’elle pourra devenir.

Je m’offusquai d’entendre ainsi décider de son sort devant elle, soucieux du