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s’écrie : « Mais si, pour un aliment, ton frère est attristé, tu ne marches pas selon l’amour. » C’est au défaut de l’amour que nous attaque le Malin. Seigneur ! enlevez de mon cœur tout ce qui n’appartient pas à l’amour… Car j’eus tort de provoquer Jacques : le lendemain je trouvai sur ma table le billet même où j’avais copié le verset : sur le dos de la feuille, Jacques avait simplement transcrit cet autre verset du même chapitre : « Ne cause point par ton aliment la perte de celui pour lequel Christ est mort. » (Romains XIV, 15.)

Je relis encore une fois tout le chapitre. C’est le départ d’une discussion infinie. Et je tourmenterais de ces perplexités, j’assombrirais de ces nuées, le ciel lumineux de Gertrude ? — Ne suis-je pas plus près du Christ et ne l’y maintiens-je point elle-même, lorsque je lui enseigne et la laisse croire que le seul péché est ce qui attente au bonheur d’autrui, ou compromet notre propre bonheur ?