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III


Je n’avais presque pas pu voir Abel Vautier cette année ; devançant l’appel, il s’était engagé, tandis que je préparais ma licence en redoublant une rhétorique. De deux ans moins âgé qu’Abel, j’avais remis mon service à la sortie de l’École Normale où tous deux nous devions entrer cette année.

Nous nous revîmes avec plaisir. Au sortir de l’armée, il avait voyagé plus d’un mois. Je craignais de le trouver changé ; simplement il avait pris plus d’assurance mais sans rien perdre de sa séduction. L’après-midi qui précéda la rentrée, et que nous passâmes au Luxembourg, je ne pus retenir ma confidence et lui parlai longuement de mon amour, que