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la porte étroite

Tu feras plaisir à ton oncle et à Juliette en allant là-bas…

— Vous voulez dire à Alissa.

— C’est vrai ! Pardon… Croirais-tu que je m’étais figuré que c’était Juliette que tu aimais ! jusqu’à ce que ton oncle m’eût parlé… il n’y a pas un mois… Tu sais, moi, je vous aime bien, mais je ne vous connais pas beaucoup ; j’ai si peu l’occasion de vous voir !… et puis je ne suis guère observatrice ; je n’ai pas le temps de m’arrêter à regarder ce qui ne me regarde pas. C’est toujours avec Juliette que je t’avais vu jouer… j’avais pensé… elle est si jolie, si gaie.

— Oui, je joue encore volontiers avec elle ; mais c’est Alissa que j’aime…

— Très bien ! très bien, libre à toi… moi, tu sais, autant dire que je ne la connais pas ; elle parle moins que sa sœur ; je pense que, si tu l’as choisie, tu as eu quelque bonne raison pour cela.

— Mais, ma tante, je n’ai pas choisi de