Page:Gide - La Porte étroite, 1909.djvu/252

Cette page a été validée par deux contributeurs.
250
la porte étroite

Paris, mes occupations, mes relations ; qu’est-ce que je venais faire dans le Midi ? pourquoi n’irais-je pas jusqu’à Aigues-Vives où Édouard serait si heureux de me voir ?… Puis elle me donnait des nouvelles de tous, parlait de son mari, de ses enfants, de son frère, de la dernière récolte, de la mévente… J’apprenais que Robert avait vendu Fongueusemare, pour venir habiter Aigues-Vives ; qu’il était maintenant l’associé d’Édouard, ce qui permettait à celui-ci de voyager et de s’occuper plus spécialement de la partie commerciale de l’affaire, tandis que Robert restait sur les terres, améliorant et étendant les plants.

Cependant je cherchais des yeux, inquiètement, ce qui pouvait rappeler le passé. Je reconnaissais bien, parmi le mobilier neuf du salon, quelques meubles de Fongueusemare ; mais ce passé qui frémissait en moi, il semblait que Juliette à présent l’ignorât ou prît à tâche de nous en distraire.

Deux garçons de douze et treize ans