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de Lui davantage… quelle émulation ce serait !

Juliette paraît très heureuse. Je m’attristais d’abord de la voir renoncer au piano et à la lecture ; mais Édouard Teissières n’aime pas la musique et n’a pas grand goût pour les livres ; sans doute Juliette agit-elle sagement en ne cherchant pas ses joies où lui ne pourrait pas la suivre. Par contre, elle prend intérêt aux occupations de son mari, qui la tient au courant de toutes ses affaires. Elles ont pris beaucoup d’extension cette année ; il s’amuse à dire que c’est à cause de son mariage, qui lui a valu une importante clientèle au Havre. Robert l’a accompagné dans son dernier voyage d’affaires ; Édouard est plein d’attentions pour lui, prétend comprendre son caractère et ne désespère pas de le voir prendre sérieusement goût à ce genre de travail.

Père va beaucoup mieux ; de voir sa fille heureuse le rajeunit ; il s’intéresse de nouveau à la ferme, au jardin, et tantôt m’a demandé de reprendre la lecture à voix haute que nous avions commencée avec Miss Ashburton et que le séjour des Teissières avait interrompue ; ce sont les