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la porte étroite

sans réticences avant que la situation, sinon le bonheur, de Juliette fut assurée.

Les nouvelles qu’Alissa me donnait de sa sœur devenaient cependant meilleures. Son mariage devait se célébrer en juillet. Alissa m’écrivit qu’elle pensait bien qu’à cette date Abel et moi serions retenus par nos études… Je compris qu’elle jugeait préférable que nous ne parussions pas à la cérémonie, et, prétextant quelque examen, nous nous contentâmes d’envoyer nos vœux.

Quinze jours environ après ce mariage, voici ce que m’écrivit Alissa :

« Mon cher Jérôme,

Juge de ma stupeur, hier, en ouvrant au hasard le joli Racine que tu m’as donné d’y retrouver les quatre vers de ton ancienne petite image de Noël, que je garde depuis bientôt dix ans dans ma Bible.

Quel charme vainqueur du monde
Vers Dieu m’élève aujourd’hui ?
Malheureux l’homme qui fonde
Sur les hommes son appui !