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désormais croître avec ma santé mon amour. Je disais vrai ; mais sans doute j’étais bien faible encore, car ce ne fut que plus d’un mois après que je désirai Marceline.

Chaque jour cependant augmentait la chaleur. Rien ne nous retenait à Biskra – que ce charme qui devait m’y rappeler ensuite. Notre résolution de partir fut subite. En trois heures nos paquets furent prêts. Le train partait le lendemain à l’aube…


Je me souviens de la dernière nuit. La lune était à peu près pleine ; par ma fenêtre grande ouverte elle entrait en plein dans ma chambre. Marceline dormait, je pense. J’étais couché, mais ne pouvais dormir. Je me sentais brûler d’une sorte de fièvre heureuse, qui n’était autre que la vie… Je me levai, trempai dans l’eau mes mains et mon visage, puis, poussant la porte vitrée, je sortis.

Il était tard déjà ; pas un bruit ; pas un souffle ; l’air même paraissait endormi. À