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gandoura blanche et sous son burnous rapiécé.

– Allons ! assieds-toi là, dit Marceline qui voit ma gêne. Amuse-toi tranquillement.

Le petit s’assied par terre, sort un couteau du capuchon de son burnous, un morceau de djerid, et commence à le travailler. C’est un sifflet, je crois, qu’il veut faire.

Au bout d’un peu de temps, je ne suis plus gêné par sa présence. Je le regarde ; il semble avoir oublié qu’il est là. Ses pieds sont nus ; ses chevilles sont charmantes, et les attaches de ses poignets. Il manie son mauvais couteau avec une amusante adresse… Vraiment, vais-je m’intéresser à cela ? Ses cheveux sont rasés à la manière arabe ; il porte une pauvre chéchia qui n’a qu’un trou à la place du gland. La gandoura, un peu tombée, découvre sa mignonne épaule. J’ai besoin de la toucher. Je me penche ; il se retourne et me sourit. Je fais signe qu’il doit me passer son sifflet, le prends et feins de l’admirer beaucoup. —