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nais en horreur mon lit, et j’eusse préféré la grange.


Le gibier abondait cette année. Lapins, lièvres, faisans, se succédèrent. Voyant tout marcher à souhait, Bute, au bout de trois jours, prit le goût de se joindre à nous.

Le sixième soir de braconnage, nous ne retrouvâmes plus que deux collets sur douze ; une rafle avait été faite pendant le jour. Bute me demanda cent sous pour racheter du fil de cuivre, le fil de fer ne valant rien.

Le lendemain, j’eus le plaisir de voir mes dix collets chez Bocage, et je dus approuver son zèle. Le plus fort, c’est que, l’an passé, j’avais inconsidérément promis dix sous pour chaque collet saisi ; j’en dus donner cent à Bocage. Cependant, avec ses cent sous, Bute rachète du fil de cuivre. Quatre jours après, même histoire ; dix nouveaux collets sont saisis. C’est de nouveau cent sous à Bute ; de nouveau cent sous à Bocage. Et comme je le félicite :