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jours, d’y aller, et je me rabattis sur mes études et sur la société de mes hôtes. Puis sitôt que je recommençai de sortir, je fus requis par une occupation très nouvelle :

Des bûcherons avaient envahi les bois. Chaque année, on en vendait une partie ; partagés en douze coupes égales, les bois fournissaient chaque année, avec quelques hauts-jets dont on n’espérait plus de croissance, un taillis de douze ans qu’on mettait en fagots.

Ce travail se faisait l’hiver, puis, avant le printemps, selon les clauses de la vente, les bûcherons devaient avoir vidé la coupe. Mais l’incurie du père Heurtevent, le marchand de bois qui dirigeait l’opération, était telle, que parfois le printemps entrait dans la coupe encore encombrée ; on voyait alors de nouvelles pousses fragiles s’allonger au travers des ramures mortes, et lorsque enfin les bûcherons faisaient vidange, ce n’était point sans abîmer bien des bourgeons.

Cette année, la négligence du père Heurtevent, l’acheteur, passa nos craintes. En