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d’abord espérer. Pourtant on m’attendait pour quelques décisions importantes, et, durant quelques jours, je dirigeai tout de mon mieux, sans plaisir, mais raccrochant à ce semblant de travail ma vie défaite.

Dès que Marceline fut assez bien pour recevoir, quelques amis vinrent habiter avec nous. Leur société affectueuse et point bruyante sut plaire à Marceline, mais fit que je quittai d’autant plus volontiers la maison. Je préférais la société des gens de la ferme ; il me semblait qu’avec eux je trouverais mieux à apprendre – non point que je les interrogeasse beaucoup – non, et je sais à peine exprimer cette sorte de joie que je ressentais auprès d’eux : il me semblait sentir à travers eux – et tandis que la conversation de nos amis, avant qu’ils commençassent de parler, m’était déjà toute connue, la seule vue de ces gueux me causait un émerveillement continuel.

Si d’abord l’on eût dit qu’ils missent à me répondre toute la condescendance que j’évi-